Sentier ou chantier, chemin ou cheni?

Lors de mes activités d’accompagnateur en montagne et durant mes loisirs, j’ai arpenté un nombre respectable de chemins de randonnée, ici et ailleurs, en montagne comme en plaine. Sente, sentier, piste, trace… Chemin magnifiquement pavé comme sur l’image de couverture de cet article ou à peine visible, autoroute à randonneurs ou infâme bourbier, j’ai tout connu ou presque.

Panneaux de randonnée pédestre

Qu’est-ce qui fait un bon chemin de randonnée? De mon humble point de vue voici les critères principaux:

  • un tracé intelligent – sûr, confortable, efficace
  • un balisage clair qui évite de se perdre ou de prendre une mauvaise direction
  • un sol le moins glissant et le plus sec et propre possible
  • un entretien régulier 

Sauf que… la réalité est parfois bien éloignée de cet idéal. Le pire côtoie le meilleur, particulièrement dans notre beau pays. Pourquoi?

En Helvétie, rien n’est laissé au hasard, et les chemins n’échappent pas à la règle. L’Office fédéral des routes – OFROU a publié le guide « Construction et entretien des chemins de randonnée pédestre » qui détaille tout ce que vous avez toujours rêvé de savoir sur le sujet sans jamais oser le demander.

Et fédéralisme oblige, voici la réponse à la question précédente, extraite du site de l’OFROU « En vertu de la loi fédérale sur les chemins pour piétons et les chemins de randonnée pédestre, les cantons sont responsables de l’aménagement et de l’entretien des chemins de randonnée pédestre. Ils peuvent toutefois déléguer ces tâches aux communes, aux associations cantonales de tourisme pédestre (organisations privées spécialisées) ou à des tiers (associations, chemins de fer de montagne, agriculteurs, cabanes de montagne, etc.). »

Un balisage efficace

Voilà qui explique la qualité très variable de nos chemins de randonnée. Pour tout vous dire, l’idée de cet article m’est venue lors d’un repérage dans la région d’Aletsch. Les sentiers y sont simplement magnifiques, non seulement en raison du paysage environnant mais également pour leurs qualités intrinsèques. Ils répondent en tout point à mes critères énoncés plus haut.

Exemple de bon chemin

Par exemple ci-dessus ce chemin qui descend une gorge très escarpée. Son assise est réalisée en pierres sèches, il est large, bien drainé. Du coup il reste dans la classification T2, ce qui le rend accessible au plus grand nombre.

Exemple de mauvais sentier

Et voici le parfait contre-exemple: une pente raide (la photo ne rend pas bien la déclivité réelle), parcourue d’après la carte nationale par un chemin de randonnée T2. Ce dernier n’existe plus, seuls quelques marches arrachées jonchent le sol. J’estime que l’on passe dès lors en T3 selon l‘échelle de difficulté du Club Alpin Suisse.

Je ne citerai pas la région, mais malheureusement ce chemin n’y est pas une exception. J’y ai vécu régulièrement des expériences pénibles, à base de clôtures quasiment infranchissables, de chemins défoncés et abominablement boueux, d’absence de balisage…

Drainage avec une tranchée

Quand on souhaite promouvoir le tourisme doux et en particulier la randonnée pédestre, il serait judicieux de s’en donner les moyens. Par exemple, quelques coups de pioche suffisent pour créer un drainage simple mais efficace.

Chemin raviné par l'orage

Autre exemple: la nuit dernière, un violent orage s’est abattu sur la région de Loèche-les-Bains. Les cascades qui dévalent les falaises abruptes ont gonflé et charrié pierres et troncs d’arbre. Dès le lendemain, des employés communaux étaient à l’oeuvre, pelle à la main, pour rétablir les chemins impactés.

Chemin alpin

Voilà, mon petit coup de gueule est poussé. Et pour positiver, je me dis que si les chemins sont mal balisés, difficiles à suivre, « paumatoires », c’est en fait une opportunité pour les accompagnateur.trice.s en montagne, qui pourront ainsi démontrer à leurs clients leur sens de l’orientation et leur valeur ajoutée 😉

JS

2 réflexions au sujet de « Sentier ou chantier, chemin ou cheni? »

  1. Merci Joel. Très bon article.
    Un autre problème est la mixité des chemins pour piétons et VTT. Les VTT, par terrain fragile, abiment considérablement les sentiers, sans compter le risque de collision vu la vitesse des VTT.

    1. Merci Alain pour ton commentaire.

      Tu as parfaitement raison. La mixité sur les chemins de randonnée pédestre est problématique, et non seulement avec les VTT mais également avec les troupeaux et même en plaine avec les cavaliers. L’explosion des VTT électriques amène des cyclistes de plus en plus haut et loin.

      De mon humble point de vue il y deux manières de résoudre ou de minimiser le problème:
      – Planifier en amont et réaliser là où cela est possible des cheminements distincts. Ça coûte cher, et parfois la configuration du terrain ne le permet simplement pas, mais c’est l’idéal.
      – Faire preuve de respect pour les autres usagers. Il faut savoir que certains cantons ont légiféré, p. ex. le Valais avec sa Loi sur les itinéraires de mobilité de loisirs, art. 12 « Sur les itinéraires de chemins pédestres, les randonneurs à pied ont la priorité sur les autres usagers, lesquels ont le cas échéant l’obligation de s’arrêter. Des dérogations sont exceptionnellement possibles en cas de situations extraordinaires. »

      A côté de la randonnée, je pratique régulièrement le VTT. Je me suis équipé d’une sonnette qui permet de signaler ma présence et d’éviter de surprendre les promeneurs. Sur les sentiers étroits je mets pied à terre et laisse passer les piétons. Il arrive parfois que certains d’entre eux restent ostensiblement au milieu du chemin pour marquer leur désapprobation. Comme partout le respect doit se manifester dans les deux sens…

      Quant à la dégradation des chemins mixtes, en particulier lorsque le sol est humide, une solution est de répandre des copeaux, mais c’est alors à nouveau une question d’entretien et de coûts.

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